Quand le stress engendré par la vie de famille devient difficile à gérer, certains parents font ce que l’on
appelle un burnout parental. Rencontre avec deux psychologues formées par l’UCL (Belgique), Sophie
Hannick et Magali Vander Borght, qui proposent depuis cette année un accompagnement de groupe
au Centre Médical des Champs du Soleil à Steinfort (GDL). Définition du burnout parental, facteurs de
risque, bénéfices d’un diagnostic précoce et de thérapies adaptées, elles nous disent tout.
Depuis plusieurs années, on observe un changement
radical dans la place attribuée à l’enfant au sein de la
société. Il faut y voir une corrélation avec la Déclaration
des droits de l’enfant adoptée en 1959 par l’Assemblée
Générale des Nations Unies et qui compte pas moins de
54 articles.
«Aujourd’hui, il est demandé aux parents d’être des hyperparents, positifs et bienveillants qui veillent à répondre à
tous les besoins physiques, scolaires et émotionnels de leurs
enfants. Les enfants doivent pouvoir s’épanouir dans toutes
les sphères de la vie, faire du sport, manger équilibré, parler plusieurs langues étrangères, faire une activité artistique
ou encore intégrer un mouvement de jeunesse. Les parents
doivent également éviter de les exposer trop aux écrans, aux
perturbateurs endocriniens, etc. Cette pression et la charge
mentale qui en découle est énorme sur leurs épaules, et ce
d’autant plus que toutes ces injonctions éducationnelles, sociétales et sanitaires sont accentuées par la publicité et les
médias… Et c’est sans compter sur les réseaux sociaux qui
véhiculent souvent des images d’une famille parfaite et heureuse, reflétant pourtant si peu la réalité !», nous explique
Sophie Hannick, également instructrice certifiée au Training Institute for Parental Burnout.
En réalité, le burnout parental peut toucher tout le
monde, tous les milieux socio-économiques, les mères
comme les pères quels que soient leur niveau d’étude,
la composition de leur famille, la taille de leur habitation,
le nombre d’enfants et l’âge de ceux-ci. Parmi les facteurs de vulnérabilité du burnout parental, ce sont ceux
qui sont plus intrinsèques au parent, à la relation avec
l’enfant ou au couple parental qui jouent un rôle prépondérant.
"Le parent parfait
n’existe pas, il faut choisir
ses combats, recentrer
les priorités et tolérer
l’imperfection! Renoncez
à être superwoman ou
superman !" SOPHIE HANNICK
«C’est l’effet cumulatif des demandes, des stresseurs qui
pèsent sur le parent et l’absence de ressources suffisantes
pour les compenser qui engendrent l’apparition d’un burnout parental.», tient à souligner Sophie Hannick.
«Pour équilibrer la balance, il faut un équilibre entre les
facteurs de risque et les facteurs de protection. Précisons
quand même que les facteurs de risque n’ont pas le même
poids, selon les facteurs de protection dont bénéficie la personne. Notre travail avec les parents consiste donc à augmenter leurs ressources propres et à diminuer en même
temps leur stress parental.», précise également Magali
Vander Borght.
Reconnaître les signes
Les symptômes caractéristiques du burnout parental
sont au nombre de trois:
- un épuisement physique et mental. Le parent a le
sentiment d’être au «bout du rouleau», il n’est plus
capable d’exercer son rôle de parent.
- un sentiment de perte d’efficacité dans son rôle de
parent. Le parent a l’impression de ne plus être à la
hauteur de ses responsabilités parentales et de ne
plus parvenir à influencer positivement le développement de ses enfants.
- une distanciation affective vis-à-vis de ses enfants. Le
parent n’a plus l’intérêt et le plaisir de s’investir dans
sa relation avec ses enfants. Il n’accorde plus autant
d’importance à ce que ses enfants vivent. Les tâches
relevant du quotidien avec ses enfants (les conduire à
l’école ou à une activité sportive, leur préparer à manger, les coucher…) sont faites de manière automatique.
Les clés pour prévenir le burnout parental ? Faitesvous confiance. Apprenez à relativiser. Prenez du temps
pour vous pour prendre soin de vos enfants. Demandez
de l’aide (par exemple, l’école des devoirs) pour faciliter
votre quotidien.
MAGALI VANDER BORGHT
Ces symptômes apparaissent de façon progressive et
contrastent fortement avec ce que le parent était auparavant.
Sophie Hannick: «Jusqu’à ce moment-là, le parent était au
contraire très investi dans sa relation avec ses enfants. Souvent soucieux de répondre de la meilleure façon qui soit aux
diverses injonctions liées au fait d’être «un bon parent» et
toujours dans le but de favoriser l’épanouissement de ses
enfants. Puis, de manière insidieuse, la frustration et la perte
d’énergie apparaissent puis l’épuisement s’installe, le parent
est en mode survie et il n’est plus le parent qu’il aurait voulu
être. Il faut bien comprendre que cette situation n’est pas
figée. On reste dans une dynamique, de sorte que la relation
avec les enfants peut toujours se reconstruire positivement
après plusieurs semaines ou plusieurs mois. Grâce aux thérapies individuelles ou en groupe, nous pouvons donner aux
parents les outils nécessaires pour réinstaurer une harmonie familiale et qu’ils puissent à nouveau partager des moments de joie avec leurs enfants.».
Soulignons également une autre spécificité du burnout parental: la vie professionnelle est souvent vécue
comme un ressourcement, un havre de paix.
Magali Vander Borght: «Le parent en burnout parental aura tendance à prolonger ses heures au travail pour éviter
de rentrer trop tôt à la maison. C’est pourquoi il est conseillé
au parent en burnout parental de ne pas arrêter le travail
pendant qu’il suit une thérapie.»
Diagnostiquer le plus tôt possible
Il faut savoir que le burnout parental touche autant la
maman que le papa. Les chiffres épidémiologiques révèlent que 5% des parents sont en burnout parental et
que 8% sont à risque élevé.
L’identification précoce de ces parents permettra de réduire la durée de la prise en charge psychologique et
d’éviter une hospitalisation dans les cas graves. Les répercussions dans le cercle familial peuvent être considérables: divorce, maltraitance et négligence des enfants…
avec au final une souffrance psychologique de tous les
membres de la famille.
Magali Vander Borght: «Contrairement au burnout professionnel, les parents n’ont pas plusieurs portes de secours.
On ne peut pas «démissionner» de ses enfants comme on
peut démissionner de son travail. Et, puis, à côté de cela,
le parent en burnout ressent une grande culpabilité, à tel
point qu’il garde longtemps pour lui son épuisement moral
et son point de saturation avant d’oser s’exprimer auprès
de son médecin généraliste ou d’une psychologue. Et quand
il s’exprime enfin, il est beaucoup trop tard. Enfin, osez demander de l’aide auprès de professionnels de la santé spécialisés dans le burnout parental dès les premiers signes de
burnout parental».
La thérapie de groupe, un levier thérapeutique
Dès les premiers signes de burnout parental, osez demander de l’aide aux professionnels de la santé spécialisés dans le domaine. Les thérapies individuelles et
de groupe donnent d’excellents résultats puisqu’elles agissent directement sur les facteurs de risque personnels, parentaux et familiaux. Les méthodes les plus couramment utilisées sont la psychologie positive, la psychologie intégrative et la pleine conscience.
Sophie Hannick et Magali Vander Borght proposent désormais chaque année (au moins) un cycle de 8 ateliers
thérapeutiques de groupe, pour 8 à 12 personnes. La
participation à l’entièreté du cycle est obligatoire pour
pouvoir bénéficier des effets thérapeutiques: confiance
en soi; normalisation de la souffrance; sentiment de
compétences et d’efficacité; sortie de la solitude, de la
honte et de la culpabilité… Les règles de bienveillance et
de confidentialité y sont bien sûr respectées.
Chaque participant a la possibilité d’une part d’échanger avec d’autres parents et de parler de ses propres
expériences, d’exprimer ses difficultés vis-à-vis de sa
parentalité, et d’autre part d’obtenir des outils concrets
visant à apaiser sa souffrance, retrouver du plaisir dans
sa parentalité et réduire ainsi les symptômes du burnout
parental ou les risques.
Ce cycle d’ateliers s’intègre à un programme thérapeutique, qui a été testé par l’UCL entre 2015 et 2018 et
dont les résultats ont été reconnus scientifiquement.
Les parents en burnout qui ont suivi ce programme thérapeutique ont en effet pu diminuer leur taux de cortisol
de 50% après 3 mois.
«La thérapie de groupe permet de libérer la parole et par
conséquent d’accélérer le processus de guérison. Il s’agit
d’une réelle valeur ajoutée au travail individuel avec le
patient. La guérison du burnout parental peut prendre du
temps, mais des évolutions spectaculaires peuvent déjà
s’observer entre la 1ère et la 8e
séance ! Sans oublier le lien
très fort qui peut se créer entre les participants si la dynamique de groupe est bonne.», s’enthousiasme Sophie
Hannick.
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